Vieira Da Silva et ses réseaux de fils

Je suis allée visiter l'exposition de Maria Helena Vieira Da Silva à Dijon.

Un mercredi matin. Il n'y avait presque personne dans les salles.

Oui, une exposition magnifique sans foule, c'est encore possible !

Je connaissais le travail de Vieira Da Silva à travers les livres et quelques oeuvres vues ça et là dans quelques musées. Je l'ai évidemment toujours trouvé inspirant et il m'influence depuis longtemps. Alors forcément, le voir pour de vrai dans un cadre comme celui du splendide musée de Dijon, c'est un réel bonheur. Je me suis régalée.

Vieira da Silva est une artiste franco-portugaise trop méconnue du grand public. Après des études à l’Ecole Supérieure des Beaux-Arts de Lisbonne, elle étudie la sculpture à l’Académie de la Grande Chaumière à Paris où elle épouse l’artiste Arpad Szenes. En 1940, le couple s’exile au Brésil pour revenir en France en 1947.

Plus célèbre que son époux tout en abordant une peinture abstraite inspirée par des thèmes tels que les bibliothèques, villes, labyrinthes, filets, grilles... On est bien loin des clichés et de ces sujets communément attribués aux femmes peintres (enfance, féminité, fleurs...). Un tel parcours artistique dans les années 50, ça m'impressionne beaucoup.

Ce que j'ai préféré dans cette exposition, ce sont les villes. Ces enchevêtrements de lignes qui structurent la plupart des compositions sont fascinants.

Au premier abord, on est tenté de voir d'abord de la perspective. La peinture de Viera Da Silva se situe après le cubisme. On pense du coup à un prolongement de toutes ces recherches qui ont eu pour objectif de remettre en cause la perspective linéaire.

Elle creuse inlassablement l'espace et modifie les codes de la perspective : on ne sait plus si on regarde par le dessus ou par le dessous, on ne sait plus si c'est de face où sur le côté.

Pour moi pourtant, ce n'est pas la perspective qui saute aux yeux.

Plutôt un réseau de fils. Qui donne parfois l'impression d'être construit selon un savant calcul de lignes symétriques. Cela me fait alors penser au motif de la grille, à la trame d'un tissus. Je vois des façades organisées en de multiples fenêtres.

La subtilité de ces compositions et la finesse de sa peinture pourrait être rapprochée du travail d'une dentelière. Les origines portugaises de Vieira sont bien présentent dans sa peinture. On vois aussi dans les tableaux remplis de petits carrés, les carreaux de faïences du Portugal.

Mais revenons à ses réseaux de lignes, de fils. La plupart du temps, tout ça se croise un peu dans tous les sens et on se demande comment elle arrive à un tel enchevêtrement ! Cela m'a fait penser aux désordre de fils électriques que l'on observe dans certaines villes d'Amérique du sud. Il y a parfois tellement de fils qui passent, s'enroulent et traversent les rues qu'on se demande comment les poteaux tiennent encore debout ! L'électricité semble parcourir des distances phénoménales de fils alors qu'il n'y a que quelques mètres entre deux maisons ! (On le voit également dans les photos de Raymond Depardon)

Les enchevêtrements de Vieira Da Silva me fascinent et je les trouve esthétiquement beaux.

J'ai toujours été fascinée par les fils, les antennes.

Ce qui m'a frappé aussi dans cette exposition ce sont les couleurs. Il n'y a pas à dire : les couleurs sont toujours plus belles et subtiles quand on voit le tableau pour de vrai.

Et les camaïeux de cette peintre sont splendides. En particulier les blancs qui se composent de multiples blancs tous différents à la fois tous gris et lumineux. Il s'en dégage un calme qui vient équilibrer le mouvement de cet imbroglio de fils.

Une image très lumineuse de la ville. C'est très beau.

Que cherchait Vieira Da Silva à travers ce travail ?

Elle dit "Dans ma peinture, on voit cette incertitude, ce labyrinthe terrible. C'est mon ciel ce labyrinthe, mais peut-être qu'au milieu de ce labyrinthe on trouvera une toute petite certitude. C'est peut-être ça que je cherche"

Ses labyrinthes, ses réseaux enchevêtrés ne sont probablement pas que recherche esthétique, recherche d'espace ou de perspective.

Les tableaux de Vieira sont mouvants et tellement vivants.

J'aime l'idée que cet enchevêtrement a peut-être pour objectif de relier les citadins, les humains de ces villes, même si on ne les voit pas réellement. Qu'il a aussi peut-être pour objectif de relier les idées de Vieira pour l'aider à effacer ses doutes et ses incertitudes et mieux comprendre qui elle était.

Je me sens proche de cette artiste et j'aurais vraiment aimé la connaitre.

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